
Aux rêveuses, aux rêveurs,
C'est avec délicatesse que s'enfoncent sous nos pieds les étendues grises et bleutés des glaciers. Guidé par les étoiles, le bruit des crampons dans la neige regelé, nous avançons timidement. Cette fois ci, la petite tâche sombre au milieu de cette infinité blanche, c'est lui, c'est moi, c'est notre cordée. Il fait froid mais je ne suis pas inquiet. Le vent nous ouvre son livre de partition et se met à chanter. Avec lui s'envolent et s'effacent nos doutes. La lune veille sur nous, nous invite à continuer. Je me retourne, la rimaye est déjà loin, je la regarde s'échapper, les lignes de fuites me prennent d'un irrésistible vertige. Nous nous sommes déjà bien élevé, dans peu de temps le dos du fantôme sera derrière nous. J'échange quelques mots avec mon compagnon de cordée, je sais qu'il ne m'entends pas mais nous nous comprenons. La flamme intense établie le lien. Nous plantons nos piolets dans la neige et poursuivons notre récital. La geste est d'une beauté pure, monotone, répétitif, il doit être maitrisé. La symphonie peut vite devenir requiem, l'erreur et l'inattention n'ont guerre leur places au milieu de ce rêve halluciné. A mesure que nous remontons cette pente fantomatique, les premières lueurs du jour viennent troubler la quiétude de la nuit. L'arc alpin s'embrase, les sommets se consument au loin d'un feu jaune et orangé. Nous nous abandonnons au froid et au vent, les milliers d'étoiles qui nous ont accompagnés le temps d'une nuit disparaissent peu à peu. Nous nous reverrons. Je les remercies en silence. Nous quittons cet univers de coton et c'est inondé de lumière que nous prenons pieds sur l'arête finale. La vierge est là, au loin, prête à nous accueillir, drapée de neige balayée par le vent. Il chante de plus belle et sculpte le faîtage en une fine et fragile ligne. Notre lien raccourci, nous entamons délicatement notre numéro d'équilibriste, suspendu entre deux mondes, livrés à la beauté pure et impassible de la montagne, une petite tâche sombre se noyant de bonheur dans cette étendue blanche. Bientôt, nous embrassons la vierge. Je ne peux m'empêcher de la remercier. Merci de veiller sur nous, merci pour cet instant éphémère si puissant que jamais rien d'en bas ne pourra m'offrir. Je regarde mon compagnon, les yeux illuminés, brulants… Nous plongeons notre regard dans ce bleu infini et rêvons. Merci beauté pure, force indomptable et sauvage qu'est la vie. Un dernier regard en direction de la vierge, une pensée pour mes proches, une pensée aux étoiles et à la lune. Le sérieux revient, il est l'heure des adieux déchirants. Piolets à la main, nous entamons prudemment le retour douloureux vers la vallée. Une vibrante invitation à tout recommencer.
" Sachant que tout a sa raison d’être et que chaque évènement sert à nous faire évoluer, j’ai le courage d’aller jusqu’au bout de mes démarches, spirituelles comme matérielles, car je suis confiant d’avoir de bons résultats. L’étincelle divine qui m’anime sait ce qui est bon pour moi. Je la laisse guider tous mes pas. Je ne m’oppose pas à sa volonté et je tiens bon, coûte que coûte."

En bleu: moi / En jaune: Ludo

Face Nord - Aiguille du midi

Ludo dans le premier pas de mixte
L’aiguille du Midi… un des emblèmes de Chamonix… Cette si belle face nord, haute de plus de 1000 m, survolée par le très célèbre téléphérique reliant Chamonix à son sommet… Une face raide, austère, que même les touristes peuvent contempler de près. Mon père a plus d’une histoire dans cette face, que ce soit au Mallory-Porter ou bien dans l’éperon Frendo. Il m’a très souvent raconté certaines de ses aventures là-bas. La première fois que j’ai pris la benne, elle n’était pas en condition et gardait un aspect terrifiant vu depuis le téléphérique. Ça ne m’avait pas empêché d’en rêver pour autant : rêver de la parcourir, seul ou à deux. Il m’aura fallu attendre plusieurs années avant d’y aller. Tous les ans, je me retrouvais à réaliser d’autres courses, ou à faire d’autres choses, à fixer ma vie… et quand je voulais y aller, c’était trop tard, les conditions étaient passées. Jeudi 8 mai 2025, je convaincs Ludo de venir avec moi “y jeter un œil”. Nous n’avons rien vu du tout… Après être montés au refuge non gardé du Plan de l’Aiguille, perché à 2207 m, nous nous sommes vite rendu compte qu’aller dans la face pourrait avoir des conséquences dramatiques. Depuis la station intermédiaire du téléphérique de l’Aiguille du Midi jusqu’au refuge, il y a environ 10 minutes de marche. Nous en avons mis 40. Nous nous enfoncions dans la neige, parfois jusqu’à la taille. Deux heures au refuge à tourner en rond et à se poser beaucoup de questions. La face est trop chargée, elle n’a pas purgé, on va brasser et devoir tout tracer… On risque d’y passer une dizaine d’heures, peut-être, dedans, exposés aux avalanches… Au bout de deux heures de questionnements à se cailler dans le refuge lugubre (2 tables, 4 bancs), j’appelle l’OHM pour avoir une idée de ce qui pourrait nous attendre dans la face.
— « C’est de la folie d’y aller. »
Maintenant, nous sommes fixés. Trois heures plus tard, nous sommes confortablement installés sur la terrasse chauffée d’un café de Chamonix. Il est 21 h.
Onze jours plus tard, lundi 19 mai 2025, 9 h du matin, Ludo et moi plantons pour la première fois nos piolets dans cette face. Nous remontons le cône d’avalanche et prenons pied dans le couloir d’attaque. Ce jour-là, les conditions sont proches de la perfection : la neige est dure, les ancrages faciles, nous évoluons rapidement. Les ressauts en mixte sont couverts d’un placage fin de glace ; il faut être vigilant à ne pas les décrocher. Nous ne faisons presque aucune pause, si ce n’est pour prendre une ou deux photos. Tout est fluide. On aurait pu gravir la face en 2 h. Malheureusement, nous en avons mis 3 : une cordée nous a fait perdre 1 h à attendre qu’ils franchissent un ressaut de mixte. Le créneau météo était court ce jour-là ; l’après-midi, le retour du mauvais temps et de la neige est attendu. Nous ne stressons pas pour autant, nous sommes larges sur l’horaire et avons la forme. Une heure plus tard, nous franchissons à notre tour le ressaut et filons en direction du sommet, par une succession de pentes de neige raides et exposées. Tout l’itinéraire l’est. Dans cette face, la chute est interdite. Nous effectuons la grande traversée finale vers la gauche afin d’éviter une section en glace. Ici, la neige est différente : une neige froide et légère. Nous nous enfonçons un peu et devons être vigilants. J’ai souvent entendu dire que cette section de l’itinéraire peut être assez longue et usante, physiquement comme mentalement : la sortie vers le sommet est visible depuis longtemps, mais à mesure qu’on avance, elle recule. Nous n’avons pas ressenti cela. Au contraire, j’étais très heureux d’être ici, d’enfin être dans ces pentes que je vois à chaque fois que je traverse l’arête de l’Aiguille en sortant du téléphérique : porte d’entrée vers le massif du Mont-Blanc… Je prends le temps de savourer ce moment. Ludo aussi. Il est midi… Nous prenons pied sur cette même arête et filons en direction de la gare d’arrivée du téléphérique, marquant le sommet de l’Aiguille… du Midi.
Enfin ! Depuis le temps que je rêvais de parcourir cette face nord… Nous profitons des quelques minutes de soleil restantes au sommet afin de profiter de la vue. Les nuages et le mauvais temps arrivent très rapidement. Vingt minutes plus tard, nous sommes de retour à Chamonix. De 3850 m à 1000 m d’altitude, le téléphérique, c’est un peu comme de la magie. Le contraste est fort entre les touristes qui montent et descendent en jean et doudoune, et nous, avec nos piolets, nos cordes, nos crampons. Le contraste l’est d’autant plus que nous sommes dévisagés par ces personnes qui ne connaissent rien de notre passion et de notre “monde”. Mais ce n’est pas pour autant quelque chose de négatif, je trouve. Au contraire, c’est même assez amusant. Quand tu vas à l’Aiguille du Midi, tu le sais d’avance. Et heureusement, ce n’est presque qu’ici que ça se passe comme ça, donc autant le prendre avec le sourire. On est autant heureux d’être ici qu’eux, c’est notre point commun !
De retour à Chamonix, nous allons célébrer cette belle matinée par un cappuccino et un coca en terrasse, dans un autre café que l’autre fois. Celui-là est bien mieux. Nous croisons Franco, un alpiniste en solo que nous avons rattrapé et ravitaillé en eau un peu plus tôt ce matin. Avec Ludo, on discute beaucoup — de filles et de montagnes, principalement… On prépare quelques prochaines courses ensemble : l’éperon Frendo, bien évidemment, Beyond Good and Evil en face nord de l’Aiguille des Pèlerins, et pourquoi pas l’éperon Tournier intégral en face nord des Droites… de quoi faire !
Merci Ludo pour ce moment magique et de m’avoir accompagné ce jour-là.

Dôme de la Sache, Mont Pourri et Mont Turia
Dimanche 14 juillet, il est 1h20 du matin, le réveil sonne. En ce jour de fête national, je me retrouve au beau milieu de la nuit accompagné de mon père, à remonter une moraine raide, éclairée à la lueur de nos deux frontales. Nous partons réaliser un itinéraire d'alpinisme définie comme majeure en Vanoise: La traversée Dôme de la Sache, Mont Pourri et Mont Turia. Une longue et sérieuse traversée en haute montagne ou la retraite parait compliquée et l'engagement de mise. A 2500 mètres d'altitude, nous chaussons les crampons. A 2700 mètres d'altitude, nous nous encordons. On vient de butter face aux premières crevasses, déjà bien ouvertes. On prend pied sur les pentes irrégulières du glacier de la Martin que l'on remontera un long moment, dans le noir. Les conditions sont idéales, le regel est de notre coté. Le topo nous invite à suivre le glacier en rive droite, mais nous ne l’écoutons pas…On remonte le glacier en son milieu. Une sorte de directissime du glacier de la Martin… Les pentes commencent à se redresser, un 2nd piolet aurai été le bienvenu. Rive droite, c'est moins pentu, rive gauche, même pas la peine d'y penser. Nous on est au milieu. Tantôt on cramponne à 12 pointes, tantôt pointes avant. Nous zigzaguons dans le dédale des crevasses ouvertes et la rimaye éclairée par les étoiles et le jour se levant. On prend de la hauteur, le dernier couloir raide en neige est franchi et bientôt on se retrouve au sommet du Dôme de la Sache à 3588m. Il est un peu moins de 6h du matin, le jour commence à se lever sur les alpes. L'arête emmenant jusqu'au sommet du Mont Pourri est magnifique. La première section est en neige puis laisse place aux cailloux jusqu'au point culminant. Du sommet du Dôme de la Sache, on ne s'attarde pas. On quitte ce dernier pour prendre pied sur l'arête, le vent nous salue. Sur le fil, nous alternons, mon père devant, puis moi, puis lui… Avec le vent, le froid à également rejoint la partie. Je commence à ressentir des sensations étranges. Je suis de temps en temps pris de vertiges et de sursauts de lucidité. Je me dis que c’est rien, qu’en mangeant et en m’hydratant un peu ça passera. Nous continuons notre progression sur l’arête et je sens mon état s’empirer au fur et à mesure que nous avançons. J’ai mal au crâne, je me sens comme détruit et je n’arrive plus a combattre les symptômes. À ce moment là, j’arête de me voiler la face et je comprends que je suis en train de faire un début de MAM (mal aigue des montagnes). Une première pour moi… et je sais déjà tout ce que cela implique. Mes pas sur l’arête sont aléatoires et imprécis. Les vertiges et les légers moments d’inconsciences deviennent plus réguliers. Mon père le remarque et prends constamment de mes nouvelles mais le vent m’empêche de l’entendre correctement. Fatigué (démolis), je m’arrête et il me rejoint. Il est pas loin de 8h, le soleil est bien installé dans le ciel. Il me pose la question fatidique, tout en sachant ce qu’il va se passer par la suite si je reste en haut: « Tu veux faire quoi Hugo ? Ici, un demi tour est encore envisageable. Si on décide de continuer, on ne pourra plus revenir en arrière ». La décision était déjà prise pour ma part. Je veux redescendre. Un sentiment de déception me prends et ne me lâche plus. Je regarde le Mont Pourri, il est là, juste devant, nous tendant les bras… Je vois ce qu’il nous reste à grimper et je sais que techniquement je n’aurai aucun soucis… Mais le début de MAM me force à abdiquer et partir de cette arête sur le champ. On fait donc demi tour, mon père m’assurant autant qu’il peut, et autour de 9h nous prenons pieds sur le glacier de la Savinaz. Nous faisons une longue pause, je mange, je bois, je reprends des forces. Quelques snickers et des amandes, beaucoup d'eau. Le mal aigue des montagnes commence à s’apaiser. C’est frustrant, il y a une heure de ça je me sentais anéanti et « hors de moi » et la je suis de nouveau bien … tout en sachant qu’il m’est interdit (pour aujourd’hui du moins) d’y retourner. À 10h, on se remet en route, la journée est encore longue, on décide de ne pas rentrer tout de suite dans la vallée. On décide d’aller visiter et explorer les autres glaciers entourant le Dôme de la Sache, le Pourri et la Turia. Celui de la Savinaz commencent à s’ouvrir et beaucoup de crevasses le cisaillent dans sa largeur. Les glaciers nord et sud de la Gurraz sont eux bien ouverts. Des gigantesques gouffres les traversent et une zone de chaos part en direction des grandes cascades en contrebas. Vers 13h, nous sommes installés confortablement dans la verdure du refuge de Turia, sous son immense face nord. On boit un coup et discutons de longues minutes avec la gardienne du refuge. On parle montagne évidement. Mon père nous raconte quelques unes de ses anecdotes d'alpiniste chevronné. Il nous raconte comment en plein milieu du mois d'aout dans les années 90 il pouvait remonter cette face encore en neige et en glace, crampons et piolets… Maintenant, il ne reste qu'une minuscule section qui doit rester en glace à l'année… Sur les environs de 15 heures, nous quittons le refuge et partons en direction du hameau de la Gurraz, lieu de départ de notre escapade familiale.
Dimanche 14 juillet, il est 1h20 du matin, le réveil sonne. En ce jour de fête national, je me retrouve au beau milieu de la nuit accompagné de mon père, à remonter une moraine raide, éclairée à la lueur de nos deux frontales. Nous partons réaliser un itinéraire d'alpinisme définie comme majeure en Vanoise: La traversée Dôme de la Sache, Mont Pourri et Mont Turia. Une longue et sérieuse traversée en haute montagne ou la retraite parait compliquée et l'engagement de mise. A 2500 mètres d'altitude, nous chaussons les crampons. A 2700 mètres d'altitude, nous nous encordons. On vient de butter face aux premières crevasses, déjà bien ouvertes. On prend pied sur les pentes irrégulières du glacier de la Martin que l'on remontera un long moment, dans le noir. Les conditions sont idéales, le regel est de notre coté. Le topo nous invite à suivre le glacier en rive droite, mais nous ne l’écoutons pas…On remonte le glacier en son milieu. Une sorte de directissime du glacier de la Martin… Les pentes commencent à se redresser, un 2nd piolet aurai été le bienvenu. Rive droite, c'est moins pentu, rive gauche, même pas la peine d'y penser. Nous on est au milieu. Tantôt on cramponne à 12 pointes, tantôt pointes avant. Nous zigzaguons dans le dédale des crevasses ouvertes et la rimaye éclairée par les étoiles et le jour se levant. On prend de la hauteur, le dernier couloir raide en neige est franchi et bientôt on se retrouve au sommet du Dôme de la Sache à 3588m. Il est un peu moins de 6h du matin, le jour commence à se lever sur les alpes. L'arête emmenant jusqu'au sommet du Mont Pourri est magnifique. La première section est en neige puis laisse place aux cailloux jusqu'au point culminant. Du sommet du Dôme de la Sache, on ne s'attarde pas. On quitte ce dernier pour prendre pied sur l'arête, le vent nous salue. Sur le fil, nous alternons, mon père devant, puis moi, puis lui… Avec le vent, le froid à également rejoint la partie. Je commence à ressentir des sensations étranges. Je suis de temps en temps pris de vertiges et de sursauts de lucidité. Je me dis que c’est rien, qu’en mangeant et en m’hydratant un peu ça passera. Nous continuons notre progression sur l’arête et je sens mon état s’empirer au fur et à mesure que nous avançons. J’ai mal au crâne, je me sens comme détruit et je n’arrive plus a combattre les symptômes. À ce moment là, j’arête de me voiler la face et je comprends que je suis en train de faire un début de MAM (mal aigue des montagnes). Une première pour moi… et je sais déjà tout ce que cela implique. Mes pas sur l’arête sont aléatoires et imprécis. Les vertiges et les légers moments d’inconsciences deviennent plus réguliers. Mon père le remarque et prends constamment de mes nouvelles mais le vent m’empêche de l’entendre correctement. Fatigué (démolis), je m’arrête et il me rejoint. Il est pas loin de 8h, le soleil est bien installé dans le ciel. Il me pose la question fatidique, tout en sachant ce qu’il va se passer par la suite si je reste en haut: « Tu veux faire quoi Hugo ? Ici, un demi tour est encore envisageable. Si on décide de continuer, on ne pourra plus revenir en arrière ». La décision était déjà prise pour ma part. Je veux redescendre. Un sentiment de déception me prends et ne me lâche plus. Je regarde le Mont Pourri, il est là, juste devant, nous tendant les bras… Je vois ce qu’il nous reste à grimper et je sais que techniquement je n’aurai aucun soucis… Mais le début de MAM me force à abdiquer et partir de cette arête sur le champ. On fait donc demi tour, mon père m’assurant autant qu’il peut, et autour de 9h nous prenons pieds sur le glacier de la Savinaz. Nous faisons une longue pause, je mange, je bois, je reprends des forces. Quelques snickers et des amandes, beaucoup d'eau. Le mal aigue des montagnes commence à s’apaiser. C’est frustrant, il y a une heure de ça je me sentais anéanti et « hors de moi » et la je suis de nouveau bien … tout en sachant qu’il m’est interdit (pour aujourd’hui du moins) d’y retourner. À 10h, on se remet en route, la journée est encore longue, on décide de ne pas rentrer tout de suite dans la vallée. On décide d’aller visiter et explorer les autres glaciers entourant le Dôme de la Sache, le Pourri et la Turia. Celui de la Savinaz commencent à s’ouvrir et beaucoup de crevasses le cisaillent dans sa largeur. Les glaciers nord et sud de la Gurraz sont eux bien ouverts. Des gigantesques gouffres les traversent et une zone de chaos part en direction des grandes cascades en contrebas. Vers 13h, nous sommes installés confortablement dans la verdure du refuge de Turia, sous son immense face nord. On boit un coup et discutons de longues minutes avec la gardienne du refuge. On parle montagne évidement. Mon père nous raconte quelques unes de ses anecdotes d'alpiniste chevronné. Il nous raconte comment en plein milieu du mois d'aout dans les années 90 il pouvait remonter cette face encore en neige et en glace, crampons et piolets… Maintenant, il ne reste qu'une minuscule section qui doit rester en glace à l'année… Sur les environs de 15 heures, nous quittons le refuge et partons en direction du hameau de la Gurraz, lieu de départ de notre escapade familiale.




Là haut
Bien qu'à chaque fois nos péripéties se déroulent dans la neige, la glace et le cailloux, certaines aventures vous marquent plus que d'autres. De par leur beauté, de par leur difficultés, les risques objectifs et l'engagement… et certaines fois grâce aux compagnons avec qui vous partagez ces voyages extraordinaires et hors du temps. Cette sortie fait partie de la dernière catégorie. La découverte d'un massif, de sommets majestueux, d'une vallée profonde dans un pays que j'affectionne tout particulièrement.
Bien qu'à chaque fois nos péripéties se déroulent dans la neige, la glace et le cailloux, certaines aventures vous marquent plus que d'autres. De par leur beauté, de par leur difficultés, les risques objectifs et l'engagement… et certaines fois grâce aux compagnons avec qui vous partagez ces voyages extraordinaires et hors du temps. Cette sortie fait partie de la dernière catégorie. La découverte d'un massif, de sommets majestueux, d'une vallée profonde dans un pays que j'affectionne tout particulièrement.
J'ai rendez-vous à 9h en cette belle matinée du jeudi 11 avril 2024 à Ugine chez mon ami Philippe où mon père et Adrien m'attendent, un grand sourire au visage. Philippe, c'est un ami de longue date avec qui j'ai pu partager la scène durant plusieurs années, en France, en Suisse, en Europe et même au Japon où nous avions fait une tournée de 10 jours. On jouait tout deux ensemble dans un groupe de rock assez populaire... Mais aujourd'hui, c'est de montagne qu'on parle alors revenons au sujet principal.
Je rejoins donc mon père et Adrien chez Philippe qui m'a gentiment autorisé à laisser ma voiture dans son garage le temps d'une escapade Italienne les skis aux pieds. Mon père et Adrien sont en pleine forme. Moi aussi d'ailleurs ! Il faut dire que cette saison, on aura beaucoup écumé les massifs de notre cher pays, surtout celui de la Lauzière et du beaufortain. Du dénivelé et des courses plus ou moins techniques on en a eu fait quelques unes déjà depuis le mois de novembre, on est paré pour celle ci... Bien que les difficultés techniques soit modérées, la course n'en reste pas moins sublime et avons tous 3 hâte d'y entamer nos premières conversions. Je réalise au moment ou j'écris ces lignes que je n'ai toujours pas mentionné ou l'on se rend. Ceux qui connaissent la montagne comprendront très rapidement grâce aux indices suivants: Italie, ski, 4000m d'altitude dépassé.
Je rejoins donc mon père et Adrien chez Philippe qui m'a gentiment autorisé à laisser ma voiture dans son garage le temps d'une escapade Italienne les skis aux pieds. Mon père et Adrien sont en pleine forme. Moi aussi d'ailleurs ! Il faut dire que cette saison, on aura beaucoup écumé les massifs de notre cher pays, surtout celui de la Lauzière et du beaufortain. Du dénivelé et des courses plus ou moins techniques on en a eu fait quelques unes déjà depuis le mois de novembre, on est paré pour celle ci... Bien que les difficultés techniques soit modérées, la course n'en reste pas moins sublime et avons tous 3 hâte d'y entamer nos premières conversions. Je réalise au moment ou j'écris ces lignes que je n'ai toujours pas mentionné ou l'on se rend. Ceux qui connaissent la montagne comprendront très rapidement grâce aux indices suivants: Italie, ski, 4000m d'altitude dépassé.
Avec Adrien, on est ami depuis notre enfance. Il est un très fort skieur.
Avec mon père, on est ami depuis ma naissance. Il est un très fort skieur.
On quitte Philippe et rejoignons Chamonix par le val d'Arly. Le tunnel du Mont Blanc nous allège de 2,4 grammes. Le poids additionné de 3 billets de 20euros... On se faufile entre les camions et rejoignons l'Italie, l'aiguille noire et la blanche de Peuterey dans notre dos, l'immense arête rejoignant l'extrémité Est des grandes Jorasses… la barrière de glace et de roche qui sépare la France de l'Italie. Adesso siamo in Italia. Ma non veniamo a mangiare pasta e bere limoncello. Quelques minutes de routes suffisent pour qu'on emprunte l'embranchement nous permettant l'accès à la vallée du Valsavarenche. Arrivé à Pont à midi pile. Un rapide repas d'alpiniste et nous partons, skis aux pieds, en direction de Vittorio Emmanuel 2, il rifugio, nous permettant l'accès aux merveilles naturelles que sont le Ciarforon, la Becca di Manciair, la Tresenta, le piccolo paridiso et surtout, le Grand Paradis, point culminant du massif du haut de ses 4061 mètres d'altitude.
Nous apprécions les différents cafés et bières italiennes proposées par le refuge. Ce que nous apprécieront moins sera le repas du soir. Très anecdotique… pour ne pas dire catastrophique. Ce soir là, nous avons compris que les gardiennes et gardiens de Vittorio Emmanuel 2 avaient un don divin. Touchés par la grâce du seigneur. A l'image de Jésus Christ qui changea l'eau en vin, Adrien vit son plat de riz se transformer en soupe coupée à l'eau.
J'en ai marre de ce refuge.
A la nuit tombée, je m'échappe et sors prendre l'air. Moment de presque solitude partagé avec un des gardiens, au téléphone avec sa copine. Au bout de 5 minutes d'italien romantique, il raccroche. J'ai presque tout compris de leur conversation, c'est vraiment une belle langue. On discute. On doit avoir le même âge. Il me confi être admiratif des alpinistes et des skieurs qui partent chaque matins réalisés des courses de plus ou moins grandes ampleurs. Pour lui, elles le sont toutes.
Une heure avant le levé du jour. Une heure avant que la vie reprenne.
Il doit être 4 heures du matin. Un petit déjeuné vite expédié et nous voila de nouveau sur nos skis. Dehors, l'aube se lève et les étoiles se couchent. Finit la veille, finit leur protection. Les premières lueurs du jour nous laisse entrevoir la Becca di Monciair et le Ciarforon s'embraser et s'inonder de lumière. Nous montons à bonne allure. Il faut dire que les conditions de neige sont excellentes. Au fur et à mesure, nous rattrapons et doublons les pressés du refuge qui, dans une fureur matinale, souhaitaient arriver les premiers là-haut.
Nous saluons le gigantesque sérac du glacier supérieur du Grand Paradis. Il surplombe l'itinéraire Chabod. Un glaçon aux dimensions spatiale. Le vent se lève. Il a convié son ami le froid à se joindre à lui. On ne traine pas et nous nous remettons en route. Au prix de quelques traversées et conversions, nous atteignons finalement le haut du glacier et butons face au ressaut rocheux final du Grand Paradis. Vient le moment relooking. Nous troquons nos skis et bâtons en échange de crampons et de piolets.
Les quelques skieurs devant nous filent tous en direction de la madone blanche. La vierge est installée en réalité sur une antécime du Grand Paradis qui n'est pas le sommet officiel. Nous décidons de ne pas nous y rendre tout de suite et de filer en traversant au milieu de la face pour rejoindre le véritable point culminant. Après avoir gravit un petit couloir de neige et de mixte nous atteignons l'arête finale, bien après la madone. Quelques minutes de funambulisme aisé nous permettent l'accès au vrai sommet. Le funambulisme, j'adore ça. A notre droite, l'Italie, en face, la Suisse avec le Cervin et le Mont Rose… A gauche, la France, la majestueuse face nord de la Grande Casse, la Tsanteleina et j'en passe. L'apothéose.
Cette sensation intense d'être à 4000 mètres d'altitudes et de contempler la courbure de notre maison sphérique. Au printemps, la vue est sublime. Plus qu'en été. Le voile bleuté, souvent présent aux mois de juillet et d'aout, troublant le champs de vision, masquant les détails lointains, n'existe pas. Au printemps, la vue est pure, cristalline. Vision angélique. Des étendues neigeuses à perte de vue entrecoupées de vallées profondes ou se terrent les humains. La force de la nature, impassible, qui se fiche de nos états d'âmes et de nos ambitions d'Hommes, aussi grande soient-elles. L'horizon est dévoré par l'azur du ciel. Un ciel immaculé, un bleu si bleu… Je me noie dans la beauté que m'offre ce spectacle. j'étouffe, je ne sais ou regarder. Comme pris de panique ou d'angoisse, je veux voir partout en même temps, je veux m'imprégner de toute la richesse gracieusement offerte par dame nature en personne. Je veux me souvenir éternellement de ce moment, qu'il ne disparaisse à jamais. Je me sens écrasé par le poids de l'émotion, je réalise que c'est la première fois que je me retrouve à 4000 mètres d'altitude avec mon père et avec Adrien. Quel joie !
Après de longues minutes de contemplation et de méditations, seuls tout les trois au sommet, nous décidons d'emprunter à nouveau l'arête finale, à contre sens cette fois ci. Rejoindre la vierge blanche et les dizaines et dizaines de guides italiens accompagnés de leurs clients, tous peu dégourdis et maladroits. Au prix de quelques pas de désescalades aisés en mixte, nous rejoignons nos traces de montées et accédons à la base du petit ressaut rocheux équipés de barreaux d'échelles afin de rejoindre la madone. Quelques italiens encordés à leurs guides peinent à monter les barreaux d'échelles avec les crampons. Ils se vâchent à chacun des barreaux… Monter 2 mètres d'échelle leur prend une dizaine de minutes… nous emboitons le pas et arrivons finalement face à la belle immaculée. Séance photo en cours ! Poussez vous tous !
Le shooting pour Vogue Montain ITALIA est désormais terminé. On retourne gentiment à notre dépôt de matériel. Relooking rapide en sens inverse: On échange cette fois ci piolets et crampons contre bâtons et skis. Je m'apprête à découvrir le "bonheur" de skier une neige balayée par le vent à 4000m d'altitude. Quel joie… pas vraiment.. mais quel joie quand même de descendre à vive allure. La descente de ce sommet en alpinisme classique doit être pénible et éprouvante. Un peu moins d'une heure plus tard, nous sommes attablé au rifugio vittorio Emanuel II pour faire le plein d'énergie houblonneuse et caféinée sous le grand soleil italien. Les glaciers scintillent tout autour de nous. Les groupes d'alpinistes et de skieurs installés au refuge ont l'air heureux et fatigués. La bonne humeur est de mise pour tous à l'exception de ce suisse qui se mit à insulter ses compagnons pour l'avoir fait traverser des zones dangereusement exposés aux avalanches et autres départ de séracs. Nous ne tardons pas à rechausser les skis et à descendre en direction de notre voiture, 1000 mètres plus bas dans la vallée. Cette section est moins plaisante à skier mais pourra paraitre très causasse aux yeux des non habitués du ski d'alpinisme et de randonnée: Nous descendrons dans le lit d'une rivière et au milieu de la foret afin d'éviter des contrepentes avalancheuses.
De retour à la voiture, heureux, nous nous félicitons et nous apprêtons à effectuer le chemin inverse de la veille. J'insisterai pour que l'on s'arrete dans un petit supermarché italien afin d'y acheter quelques tranches de prosciutto et des bouteilles d'estathé à la pêche et au citron. Une mission rondement menée.
C'est 2 heures plus tard, à Ugine, que nos routes se séparèrent. Mon père et Adrien partant en direction de la Savoie, d'Albertville et de Val Morel et moi vers Annecy, dans la yaute.
Merci à mes deux compères pour ce sublime voyage en terre italienne. Merci pour la découverte de ce vallon d'une beauté infinie, merci pour ces moments de partage si forts, à jamais gravé en moi. Partager ça avec son père et un ami d'enfance (à lire: un frère), ça n'a pas de prix. Éternellement reconnaissant.
Et surtout: Grazie per tutto nella vita.





FOUTU CORDE
Il restait encore quelques belles journées en ce mois d’aout 2023… Le froid était de retour… du moins, là haut. Avec le copain Chris on avait décidé d’aller rendre visite à la Dent du Géant ensemble. Lui pour une revanche, et moi pour une première. Il était venu 4 ans plus tôt avec un ami mais avait tout deux du être évacué par hélicoptère suite à une dégradation de santé de son compagnon… Pour moi, la dent du géant c'est premièrement une façon symbolique de rendre hommage à mon héro Patrick Berhault, mais aussi d'aller une bonne fois pour toute en haut de ce magnifique menhir qui m'obsède tant… Un magnifique bouclier de granit culminant à 4013m, stèle omniprésente du massif du Mont Blanc. Peu importe où l’on se trouve dans le massif, on voit cette dent gigantesque, qui partage son arête avec certaines stars du massif : le dôme et l’aiguille de Rochefort… et les Grandes Jorasses.
Parti tranquillement en milieu d’après-midi de Chamonix, nous avons pris le raccourci Tokyo-Torino avec escale à Dubaï et avons traversé le glacier, grimpé la base de la dent et installé nos duvets à l’abris d’un rocher après une petite opération terrassement de glace. La météo n'était pas vraiment avec nous ce soir là. Tout le massif est bouché, mis à part une trouée nous permettant d'entrevoir au loin l'aiguille du midi, enflammée par le soleil couchant. Le vent se lève à l'heure du repas... prémisse d'une nuit glaciale... Quelques cigarettes et du quinoa, un snicker, de l'eau et nous voila dans nos duvets. Une bonne nuit requinquante (non) à 3850m d’altitude, sous le grésille et la petite neige tombante marquant l’arrivée proche de l’automne. Réveil glaciale, on ouvre les yeux, nuit noire… J'entends la voix de Chris du fond de son duvet "vient on dort encore"... "ok mec". On attendra le levé du soleil pour sortir de nos cocons de plumes. Le matin, après un petit dej express, on grimpait la dent par la face SW, tantôt à l’ombre, puis au soleil sur un granit d’une très grande beauté. Interdiction de toucher à la corde italienne, interdiction de mettre les chaussons. La dent du Géant qui est un sommet très esthétique visuellement, mais souillée par cette grosse corde blanche ayant pour but d'aider les "alpinistes" à atteindre un sommet qui leur serai inaccessible sans… Sur une montagne aussi majestueuse, je vois ça comme de la profanation. Je n'aime pas ces gens là, qui souhaitent rendre tout accessible. Évidement, on reste libre de l'utiliser ou non... Son existence en ces lieux me dérange. Bien content de ne pas l'avoir touché pendant notre ascension.
Au sommet, la madone, noire, trouée par la foudre sur le haut du crâne, nous attendait paisiblement. Une vue imprenable sur la reine du massif, la Verte et son célèbre toboggan de la face S… Là haut, on traine pas. On veut s'échapper avant que les cordées guidées arrivent au sommet. Quelques rappels aériens pour retourner au pied de la Dent et récupérer nos affaires de bivouac, planqué le matin même sous des cailloux à l'abris des regards. La suite de la descente aura été plus délicate, il fallait désescalader la base tout en passant entre les gouttes (ou plutôt les cailloux) et prendre pieds sur le glacier du géant. L'inconvénient d'être les premiers à descendre cette face, c'est que tu es aussi le premier à recevoir les projectiles envoyés par les copains du dessus. Vigilance donc dans ce tas de pus. On franchis la rimaye en sens inverse par un grand saut… plus qu'à retraverser le glacier, boire un cappuccino à Torino et rentrer à Chamonix.
Au sommet, la madone, noire, trouée par la foudre sur le haut du crâne, nous attendait paisiblement. Une vue imprenable sur la reine du massif, la Verte et son célèbre toboggan de la face S… Là haut, on traine pas. On veut s'échapper avant que les cordées guidées arrivent au sommet. Quelques rappels aériens pour retourner au pied de la Dent et récupérer nos affaires de bivouac, planqué le matin même sous des cailloux à l'abris des regards. La suite de la descente aura été plus délicate, il fallait désescalader la base tout en passant entre les gouttes (ou plutôt les cailloux) et prendre pieds sur le glacier du géant. L'inconvénient d'être les premiers à descendre cette face, c'est que tu es aussi le premier à recevoir les projectiles envoyés par les copains du dessus. Vigilance donc dans ce tas de pus. On franchis la rimaye en sens inverse par un grand saut… plus qu'à retraverser le glacier, boire un cappuccino à Torino et rentrer à Chamonix.
Une jolie course en bonne compagnie. J’en garde de vifs souvenirs. Merci au copain Chris pour ces deux belles journée d’aout à partager notre passion commune et ce qui nous anime.
photo: Mathis Dumas



COLLANT PIPETTE DU SEUMNOZ
J’avoue que je me posais la question sur cette sortie… Un entraînement, pourquoi j’écrirais là-dessus ? Quelle est la pertinence d’un texte autour de ça… Bon, c’est décidé, mais autant prévenir tout de suite : pour le ski, ce n’est pas très intéressant, c’est une certitude. Je vais tâcher de rendre ce récit un peu plus sympa, mais sans romantiser ni exagérer. D’ailleurs, en me garant, j’écoutais un podcast qui parlait (en partie) de « romantiser les microtransactions dans le monde du streaming et du jeu vidéo ». Y a vraiment des gens qui ont le temps de se poser et de réfléchir à ça… c’est fou ! Je ne joue pas tant aux jeux vidéo que ça, mais j’ai quand même écouté le podcast jusqu’au bout.
La montée en voiture, derrière une file de 92/93/75, m’a fait bouillonner. J’ai failli appeler ma boss pour lui dire que je serai en retard au bureau demain à 7h45. Au Semnoz, je me gare le long de la route, prêt à en découdre avec le dénivelé. Mais avant de vous raconter la sortie, il faut que je contextualise ! Sinon, ça ne fait aucun sens.
Tout a commencé ce matin… ou plutôt hier soir, après un enchaînement de plusieurs films avec mon coloc et la fille qu’il fréquente. J’ai bien vu l’heure tourner, minuit passé depuis longtemps, et de toute façon je voulais un peu me trouver une excuse pour ne pas faire le vaillant ce matin. Nico et ses potes m’avaient donné RDV à 8h à Thônes pour aller skier un truc qui me stresse. Bien trop tôt pour mon état de fatigue, corporel et mental. Moi, ce que je voulais, c’était faire une sortie à la cool, avec un RDV à 10h. Pas à 8h…
— « Yo mon Nico, bon, moi demain je vais dormir un peu, pis façon je le sens pas trop, j’irai avec mon père ou Nathan là-bas, t’en fais pas pour moi ! Bon ski les copains. »
Qu’est-ce que j’ai bien dormi cette nuit-là ! J’étais au max en me levant après 9h de sommeil. Un peu de ménage et de rangement… pour une fois que j’ai un peu de temps le week-end ! La contextualisation étant terminée, je vais pouvoir vous raconter pourquoi je me suis retrouvé garé au parking du Semnoz un dimanche après-midi… La vérité, c’est que je me sentais coupable de ne rien faire par un si beau dimanche. Je culpabilisais à fond.
— « Hugo, t’es vraiment un naze de rien faire aujourd’hui. »
— « Et ça se dit montagnard mais tu sors pas aujourd’hui ? »
— « P’tit tocard. »
Après un beau dialogue avec moi-même, je chausse enfin les skis. Vous savez, je suis un collant-pipette qui se cache (mais qui se cache de moins en moins). Je me suis dit que faire du D+ serait une bonne idée. J’aimerais bien me mettre aux compétitions de ski-alpinisme dans un futur proche. Alors, pour l’entraînement et pour garder la forme, je suis parti du bas de la station, et je suis monté jusqu’en haut, à la croix sommitale. Combien de fois, vous allez me demander ? 8 fois. Heureusement, les 8 montées (et descentes) ont été réalisées par un professionnel (moi), et sur des petites variantes d’itinéraires dans la forêt et sur le plateau. La vue est tellement belle là-haut qu’au final, quand je descends, je sais pourquoi je remonte. Et je me dis aussi que c’est toujours plus motivant de faire 8 allers-retours au Semnoz que de courir l’étape du mondial de ski-alpinisme en Azerbaïdjan sur des marches tronçonnées (ISMF, que je t’aime).
Donc voilà, j’ai passé les 2000 m de D+ aujourd’hui. Ça ne m’a pas coûté beaucoup, très honnêtement, et ça m’a donné de bonnes garanties concernant mes envies de ski-alpinisme. Mais ne vous inquiétez pas trop pour moi : mon premier amour, c’est l’alpinisme. Le vrai. Avec des piolets, toute la ferraille, et parfois les skis sur le sac à dos. La Pierra Menta me fait rêver, mais la Heckmair à l’Eiger ou la Schmid au Cervin encore plus. Je voulais faire 10 montées, mais la nuit m’a rattrapé, et j’ai préféré un petit repas au coucher de soleil.




